La Presse, Montréal, mercredi
28 août 1996 Denis Arcand
Qu'a révélé l'examen
des restes du policier Dupont au Dr. Baden ?
"Il avait contredit
les conclusions du coroner de Los Angeles et qualifié
certaines théorie d’un des avocats du ministère public
«d’idiotes»."
"Un des procureur de
la poursuite, Brian Kalberg, avait présenté le docteur Baden
comme une personne en mal de publicité."
"Le docteur Baden
(...) n’en n’était pas à sa première prise de bec avec un
procureur."
"Il avait été congédié
comme corner de la ville de New-York après moins d’un an."
"ll avait d’ailleurs
intenté un retentissant procès au maire de la ville (...)
qu’il avait (...) perdu en appel."
Trois-Rivières - Si quelqu’un sur
terre est capable de faire parler, après 27 ans, les restes du policier
Louis Georges Dupont, ce doit bien être le docteur Michael Baden.
Ce médecin-légiste américain a examiné hier les restes du policiers de
Trois-Rivières dans le cadre d’une nouvelle enquête obtenue à la demande de
la famille, convaincue que le policier ne s’est pas suicidé mais a été
assassiné par la pègre ou des policiers corrompus.
Le docteur Baden ne craint pas la controverse. Il s’est prononcé sur presque
toutes les énigmes judiciaires qui ont fasciné l’opinion publique américaine
depuis 30 ans, devenant ainsi un témoin privilégié de l’histoire américaine
contemporaine et on observateur averti de la mort comme enjeu politique chez
nos voisins du sud.
Un des « patients » du docteur Baden fut le président John F. Kennedy,
abattu à Dallas en 1963. Quatorze ans après l’assassinat, un comité spécial
du congrès américain la mandaté pour réviser les données pathologiques
colligées peu de temps après le meurtre.
Dans son livre Unnatural Death (Random House, 1989, il décrit l’autopsie
faite à l’époque comme un cas exemplaire de cafouillage et d’incompétence.
Le corps du président avait été évacué illégalement dans la juridiction où
le meurtre avait été commis et envoyé en secret dans un hôpital militaire
non loin de Washington. Le cadavre avait alors été confié à un médecin naval
n’ayant jamais fait d’autopsie sur un sujet mort par balle. Comme la famille
- et l’État - attendaient le corps, le
coroner improvisé n’avait même pas pris la
peine de tracer la trajectoire des balles à travers la tête du président,
grâce aux orifices d’entrée et de sortie, a écrit le docteur Baden.
En étudiant des photographies des blessures, il a établi que les balles
étaient toutes entrées par derrière, ce qui tendrait à étayer la thèse du
tueur solitaire.
L’incompétence et une déférence injustifiée pour la famille, a-t-il écrit,
ont nuit à l’intérêt national en créant un climat d’incertitude propice au
spéculations les plus noires.
Il a établi la cause de la mort de l’acteur John Belushi (surdose d’héroïne)
en 1985. En août 1995, il a aussi fait un témoignage remarqué pour la
défense lors du procès de O. J. Simpson. Il avait contredit les conclusions
du coroner de Los Angeles et qualifié certaines théorie d’un des avocats du
ministère public « d’idiotes ».
Un des procureur de la poursuite, Brian Kalberg, avait présenté le docteur
Baden comme une personne en mal de publicité.
Le docteur Baden, un New-Yorkais, n’en n’était pas à sa première prise de
bec avec un procureur. En août 1979, il avait été engagé comme corner de la
ville de New York. Trop indépendant au goût des procureurs, il avait été
congédié après moins d’un an. Il avait d’ailleurs intenté un retentissant
procès au maire de la ville de d’alors, Ed Koch, qu’il avait gagné en
première instance, mais perdu en appel.
Le docteur Baden a vertement critiqué le
système médico-légal américain, qu’il qualifie de fouillis. Les États-Unis
n’ont aucun système ordonné pour établir la cause d’un décès. Dans diverses
régions, dénonce t-il, la cause de la mort peut être établie par
l’entrepreneur de pompes funèbres, ou même le type qui possède un camion
remorque servant à enlever le cadavre. Ce qui mène à des diagnostiques de
décès faux, donc à des acquittements erronés ou des condamnations pour des
crimes qui était en fait des accidents.
Le policier Dupont est en terre depuis 27 ans, mais le docteur Baden à
travaillé sur un cas plus anciens, celui du fils de l’aviateur Charles
Lindberg, kidnappé et tué à la fin des années 20. Travaillant à partir de
données de l’époque, il a établi que le nourrisson n’avais pas été tué par
une fracture du crâne, mais bien étouffé. Les « fractures » identifiées par
un coroner de l’époque était en fait les espaces entre la fontanelle et le
reste du crâne.
Le docteur Baden doit rédiger son rédiger rapport aujourd’hui et témoigner
demain. Si la famille a raison, certains retraités dormiront mal cette nuit.